Étiquette : Ecologie

Une année sur la route

Que retiendrai-je de cette année de voyage en famille? Qu’est-ce que le temps, qui efface progressivement les souvenirs, me laissera comme images inoubliables? Quelles impressions survivront dans ma mémoire? J’ai le sentiment qu’il est difficile de répondre à ces questions. Les photos seront là comme des petits cailloux jalonnant le chemin du temps écoulé. Mais les émotions seront-elles aussi fortes ou se dissiperont-elles inexorablement? Est-ce que cette année m’a changé, nous a changés?

Nous avons vécu une année exceptionnelle. Aucun problème sérieux n’est venu obscurcir notre route. Ni maladie, ni perte d’objets, ni violences… Dans l’ensemble, nous avons rencontré des gens accueillants. Les endroits où l’accueil a été plus froid ont été rares. Nous avons vu des lieux extraordinaires et je me souviens de grands moments d’émotions. Je crois l’avoir déjà écrit ; j’ai également beaucoup aimé le temps passé en famille. Je me souviendrai assurément des moments consacrés aux cours. Les filles m’ont surpris par leur calme, leur capacité d’adaptation et leur aptitude à relativiser les petits désagréments du voyage.

Vivre une année sur la route avec un gros sac à roulette et un petit sac à dos comme seuls bagages nous fait prendre conscience que nous encombrons nos vies de nombreux objets superflus. Cette expérience, si elle comporte sa part de contraintes, fait naître un profond sentiment de légèreté. Les préoccupations du voyage se résument essentiellement à trois questions : comment se déplacer? Où dormir? Comment se nourrir? Si on est en capacité de répondre à ces trois questions alors tout va bien! Et par la force des choses, on apprend vite à relativiser les imprévus. Dans un voyage comme celui-ci, il n’est en effet pas possible de tout maîtriser. Et donc, on apprend à s’adapter tout en devenant plus insouciant.

Si le budget a été bien calculé, on comprend vite qu’il est aisé de trouver des réponses aux trois questions essentielles évoquées ci-dessus, avec les outils de communication disponibles de nos jours. Faire un tour du Monde n’est pas une aventure comme cela pouvait l’être il y a 30 ans. Au cours de cette année, j’ai pris un peu plus conscience de la réalité du concept de village global. Même si on observe des différences de culture, de traditions d’un pays à l’autre, il existe bel et bien un socle commun, que l’on nommera modernité ou mondialisation ou numérisation, qui permet de ne jamais être complètement perdu. Cela facilite la vie du voyageur. Mais peut-être est-ce dommage car il perd un peu du sel du voyage?

C’est un lieu commun : l’argent fait tourner le Monde. Au cours de cette année, nous avons mesuré les différences de richesse qui existent d’un pays à l’autre ou à l’intérieur d’un même pays. Je n’oublierai pas la pauvreté extrême ou les misères rencontrées dans les Andes, dans les rues de San Francisco, au Cambodge, ou dans le coeur rouge de l’Australie.

Durant ce voyage, je ne voulais pas me contenter d’une position seulement contemplative. Je tenais à être acteur de ce moment pour partager, pour en conserver des traces, pour en faire un temps de réflexion. J’ai pu me livrer à la photographie comme jamais auparavant. Le blog a été ma discipline, mon rendez-vous quasi quotidien avec l’écriture. Bien sûr, il a nécessité un effort constant mais la satisfaction recueillie en a été que plus grande. J’en profite d’ailleurs pour remercier les lecteurs actifs ou silencieux qui ont suivi ce récit.

L’organisation du voyage au fil de l’eau, les visites, la photographie, le temps consacré au blog, les cours faits avec les filles, ont empli une bonne partie de mes journées. Mais il me restait encore du temps pour lire et réfléchir. J’ai beaucoup lu. J’ai réfléchi. Je peux le dire maintenant ; j’ai changé. Etrangement, alors que nous faisions un voyage avec de nombreux vols en avion, j’ai senti naître progressivement en moi une nouvelle conscience écologique. Cela peut paraître facile à dire maintenant. Mais si j’avais eu cette conscience écologique avant de partir, je n’aurais pas fait le voyage que nous avons fait. Entendez-moi, je ne veux pas dire que je n’aurai pas fait un tour du Monde. Je veux dire que je l’aurai fait différemment. Il n’est plus le moment d’y réfléchir et je ne me suis pas penché suffisamment sur la question. Mais probablement, aurai-je imaginé un tour du Monde avec le minimum de vols en avion, voire sans aucun vol. La traversée de l’Atlantique peut, par exemple, se faire en bateau. Bien sûr, cela aurait signifié visiter moins de pays, voyager plus lentement. Comme je l’écris, il n’est plus temps d’y penser maintenant. Ce qui est fait est fait.

Alors à la question « Est-ce que ce tour du Monde m’a changé? », je pense pouvoir répondre que oui. Plus qu’auparavant, je prends une certaine distance par rapport aux événements. J’espère être davantage en mesure d’apprécier la réelle valeur des choses. Et puis surtout, cette conscience écologique qui m’accompagne désormais a profondément changé mon regard sur le Monde.

 

Les mayas

La carte ci-dessous représente la zone d’influence des mayas au moment de la conquête espagnole. J’ai également identifié les sites que nous avons prévus de voir durant notre séjour : dans l’ordre, Tulum, Cobá, Chichén Itzá, Uxmal, Edzná, Palenque.

La civilisation maya est une des plus anciennes de la région. Les traces archéologiques attestent d’une architecture existant 1000 avant JC. A titre de comparaison, les aztèques, dont la zone d’influence se trouvait plus au nord, notamment autour de Mexico, se seraient installés dans la région aux alentours de 1400 après JC. En France, on a tendance à rapprocher ces deux peuples et à les considérer comme les deux civilisations majeures de l’Amérique précolombienne dans cette zone géographique. C’est une simplification qui oublie d’autres peuples pré-colombiens de l’actuel territoire mexicain (zapotèques, toltèques, huaxtèques, mixtèques…).

Une chose est certaine, la civilisation maya, du fait de sa longévité est une des plus importantes de l’ère pré-colombienne.

Après avoir vaincu les aztèques en 1521, les espagnols se lancèrent à la conquête des territoires mayas. Dès 1524, les mayas habitant les régions au nord du Guatemala furent défaits. En revanche, la résistance maya fut beaucoup plus forte dans la péninsule du Yucatán et la conquête espagnole fut plus progressive. Mérida fut fondée par Francisco de Montejo « el Mozo » (le jeune) en 1542. Et le dernier Etat maya, le royaume itzá de Tayasal, ne succomba qu’en 1697.

Si les mayas tombèrent après les aztèques, l’influence de leur civilisation avait fortement diminué bien avant l’arrivée des espagnols. Les historiens identifient une période classique, âge d’or de la civilisation maya, dont l’effondrement se situe autour de l’an 1000 après JC. Durant la période classique, le paysage politique s’organise autour de quelques grandes cités concurrentes qui entrent régulièrement en conflit. Après l’an 1000, les grandes constructions s’arrêtent et le monde maya semble s’émietter en une multitude de petites cités avec une influence beaucoup plus réduite. Les raisons de cette évolution brutale font l’objet de thèses multiples. Il semblerait que les études les plus récentes privilégient la conjonction de plusieurs facteurs défavorables qui expliqueraient cette régression, certains étant internes, d’autres externes. Parce qu’elles font échos à l’enjeu majeur de notre temps, certaines causes internes retenues par les historiens m’ont particulièrement frappé. Il semblerait, en effet, qu’une crise écologique et climatique pourrait avoir fortement contribué à cette régression : des années de sécheresse, une déforestation massive pour les besoins de la construction et une surexploitation des sols pourraient avoir rendu des zones de culture, de pêche et de chasse moins productives (voire parfois stériles). Par ailleurs, l’augmentation de la population à l’époque classique aurait été trop rapide par rapport à ce que les avancées technologiques permettaient de gérer, en termes d’organisation et en termes d’approvisionnement en nourriture.

Ne sommes-nous pas en train de vivre la même chose, à l’échelle de la planète?